Non Finito la nouvelle exposition de photographies de Julien Drach, rend hommage à la statuaire antique (principalement au carré des Niobides commandé par Balthus lorsqu’il dirigeait la Villa Médicis).
L’ancien ensemble de sculptures dites Les Niobides, unique en son genre, fut découvert grâce à des fouilles archéologiques datant de la fin du 17ème siècle et fut ensuite acquis par Ferdinand de Medicis.
Les formes de ces statues riches en pathos ont servi de modèles pour de nombreux artistes, dont Nicolas Poussin. Les moulages à partir des antiques ont été réalisés par Michel Bourbon en 1976 sous la direction de Balthus.
Élaborée par Julien Drach lors de sa résidence de plusieurs semaines à Rome à l’automne 2018, cette série inédite témoigne d’une recherche esthétique et poétique emprunte de mystère et dévoile une autre réalité. Chacune des images est obtenue à la chambre Polaroïd avant d’être développée à partir du négatif selon un procédé spécial : cette incertitude donne à ses images leur magie et leur mystère.
Dans son essai Le principe d’ouverture qui ouvre le catalogue de l’exposition Lignes de Vie au Centre Pompidou de février à avril 2018, Michel Gauthier écrit que « l’œuvre selon Hicks se situe dans l’espace réel et cherche même souvent à entrer en rapport avec lui ». L’œuvre n’existe qu’en situation, dans un contexte spécifique. C’est d’ailleurs pourquoi Sheila Hicks a choisi le textile, pour sa plasticité et son adaptabilité. Pour Sheila Hicks, le textile est le « plus séduisant et le plus gratifiant des mediums ».
Des œuvres inspirées par le confinement Certaines des œuvres présentées dans notre exposition ont été conçues pendant les confinements et inspirées par l’enfermement. Les minimes intitulés Monolithe gracieux et Tissage d’araignée en laine filée à la main, sont similaires à de véritables toiles d’araignées colorées. Ils évoquent directement l’enfermement, à la manière des moucharabiehs, au travers desquels on n’a pas d’autres choix que de regarder notre environnement réduit à sa plus simple expression.
Ces œuvres sont fortes, inquiétantes même, figurant une élégante mais implacable prison de fils et appellent à traverser le cadre.
Sheila a été formée par un des maîtres de l’art moderne, Josef Albers qui dirigea le département de design à l’Université de Yale où Sheila entre en 1954. Il conçoit ses œuvres comme autant d’essais d’interactions entre les couleurs. Les relations chromatiques sont également essentielles pour Sheila Hicks et elle dira que c’est Albers qui « l’a éveillée au monde de la couleur et aux manières de l’utiliser ». Dans Sentinelle des sentiments, deux carrés gris semblent se dissoudre dans un fond jaune. Dans de nombreux minimes, la dimension picturale l’emporte. Pour Frédéric Bonnet, la peinture est d’ailleurs une clé de lecture essentielle de l’œuvre de Hicks. Il écrit « peindre en fils et fibres serait donc une voie originale empruntée par une artiste aimant la peinture, nourrie par la peinture, formée à la peinture mais qui, à la faveur de sa rencontre avec le textile préhispanique en 1957, décide de s’en remettre à la fibre comme medium.”
Le choix du textile provient peut-être de la « passion chromatique » de Sheila car la couleur peut faire corps avec le matériau qu’elle imprime, alors que sur la toile, elle semble appliquée, comme séparée de son objet. Cette incarnation matérielle de la couleur peut, selon Sheila Hicks, être réalisée à travers « les possibilités accrues de l’expression de la couleur en texture ».
Pour cette exposition, Sheila Hicks a conçu ses œuvres comme des objets ouverts, mouvants, capables de s’adapter à des lieux spécifiques et d’accueillir des regards différents, dans lesquels la matérialité du textile s’exprime inlassablement. Les compositions, agencements des couleurs et formes complexes laissent entendre la voix du textile, s’exprimer la « matière », qui ne se laisse jamais complètement dominée par les exigences de la forme. Sheila Hicks dit «Nous envahissons le monde de la peinture et de la sculpture par la couleur en texture ». Ses pratiques artistiques incarnent une réjouissante liberté et nous renvoient à notre propre capacité à subvertir les contraintes qui peuvent peser sur nous, et grâce à ce mélange de maîtrise et de douceur si caractéristique, à échapper au tumulte.
Le parcours de Vivian Maier (New York, 1926 – Chicago, 2009) est atypique mais c’est pourtant celui d’une des plus grandes photographes du XXe siècle. C’est au cœur de la société américaine, à New York dès 1951 puis à Chicago à partir de 1956, que cette gouvernante d’enfants observe méticuleusement ce tissu urbain qui reflète déjà les grandes mutations sociales et politiques de son histoire.
C’est le temps du rêve américain et de la modernité surexposée dont l’envers du décor constitue l’essence même de l’œuvre de Vivian Maier. L’exposition permet au public d’accéder pour la première fois à des archives inédites de la photographe, découvertes en 2007 : photographies vintages que Vivian Maier a pu tirer, films super 8 jamais montrés, enregistrements audio… L’exposition permet ainsi de saisir toute l’ampleur de l’œuvre de cette grande artiste et de replacer son œuvre dans l’histoire de la photographie.
Pour les Égyptiens, le bleu était une couleur porte-bonheur liée à l’immortalité et à la vérité. Puis, au Moyen-Âge, il devient symbole de pureté et habille la Vierge Marie. Durant cette période, c’est le bleu de lapis-lazuli ou le bleu outremer que l’on emploie. Provenant d’Afghanistan, ces pigments très onéreux ont rendu la couleur précieuse. C’est au XVIIIe siècle, à Berlin, que l’on découvre le premier pigment synthétique, le bleu de Prusse. Cette invention va déployer la couleur et son utilisation au fil du temps. En 1960, Yves Klein présente son bleu outremer unique sous le nom de IKB, International Klein Blue. Et le textile n’échappe pas à cet engouement pour la couleur la plus universelle que l’histoire et l’histoire des arts aient connue. La Galerie Chevalier-Parsua a réuni, en ce début d’année, artistes et designers qui rendent, à travers le tapis, hommage a à cette couleur.
Nicolas Aubagnac , dont les créations de mobilier et de luminaires se retrouvent dans les plus beaux intérieurs aux quatre coins du globe, à créé un tapis en hommage à Saturne.
L’œuvre tissée de Jean Lurçat est magistrale. L’artiste est internationalement connu et son nom est étroitement associé au renouveau de la tapisserie française dans les années d’après-guerre. Il est le peintre-cartonnier le plus important du XXe siècle. En 1947, Lurçat devient Président de l’Association des Peintres Cartonniers de Tapisseries. «L’A.P.C.T. groupe les artistes qui ont le plus efficacement participé à la Renaissance de la Tapisserie, c’est à dire qui ont compris l’absolue nécessité non seulement de ré-adopter le langage premier de cet art essentiellement mural, mais encore de procéder parallèlement à la réorganisation de l’industrie dont il dépend.»
Né à Paris en 1902 et mort à Venise en 1982, Picart Le Doux est un peintre autodidacte qui débute sa vie professionnelle dans la reliure et l’édition. En 1933, il aborde les arts graphiques et la publicité. Il rencontre Lurçat en 1939, mais réalise ses premiers cartons en 1943. Membre fondateur de l’Association des Peintres Cartonniers de Tapisseries (APCT), il crée de nombreux cartons et obtient des commandes de l’Etat, des communes ou de sociétés françaises et étrangères. Il sera professeur à l’Ecole Nationale Supérieure des Arts Décoratifs. Amazonie est sans doute l’un des cartons les plus aboutis de l’œuvre de Jean Picart Le Doux.
L’œuvre de Jon Eric Riis abonde de références aux Mythes et Idéaux des cultures du Passé. La technique utilisée – celle de la tapisserie de lice- et les sources d’inspirations, ancrent indéniablement l’œuvre de Jon Eric Riis dans une tradition textile ancestrale et universelle. Ses œuvres sont présentes dans de prestigieuses collections muséales américaines dont le Metropolitan Museum à New York ou l’Art Institute of Chicago.
On ne présente plus Philippe Parent dont les chantiers d’architecture intérieure et de décoration convoquent harmonie et culture, ni ses créations connues dans le monde entier.nSa signature est l’association de l’érudition et des savoir-faire traditionnels. Il était donc évidentnque la Galerie Chevalier-Parsua et Philippe Parent entreprennent un projet de tapis. Né ainsi de cette collaboration le tapis Laos, en laine et soie, allie dessin rigoureux et raffinement, deux qualités qui caractérisent le travail de Philippe Parent.
Fondé en 2016 à Tours par Elodie Michaud et Rebecca Fezard, hors- studio est spécialisé en surfaces, matières et textiles. Mode, architecture ou scénographie, elles expérimentent de nouvelles techniques dans le but de révéler la singularité de la matière.
La pratique d’Arthur Hoffner se situe, elle, à la croisée de différentes disciplines artistiques, de la sculpture au design en passant par les arts vivants. Plasticien indépendant depuis 2014, il saisit toutes les opportunités de créer, sans à priori. Fasciné par le spectacle de l’eau qui apparait en fil rouge dans ses différents projets, ses créations invitent souvent à la contemplation et l’évasion.
https://germanopratines-staging.ovh/wp-content/uploads/2022/01/38-309-Apolliniare-bleu-Lurcat-1.jpg16202126Hélènehttps://germanopratines-staging.ovh/wp-content/uploads/2019/12/logo-germanopratines-3-1030x221.pngHélène2021-09-10 18:25:002022-04-04 13:24:30Out of the Blue
Décorateur californien et personnage solaire à l’univers singulier, Ken Fulk imagine des décors fantasques marqués par le style palladien de la Villa Monticello, comme par Virginie natale ou la fantaisie et le surréalisme de Fornasetti, Tony Duquette ou Salvador Dali. Il qualifie son studio de design de “Magic Factory” car pour lui rien n’est trop beau pour élever l’art et l’esthétisme au premier plan de notre vie quotidienne.
Très proche de la Maison Pierre Frey, il a créé avec elle une collection de tissus, papiers peints et tapis déclinés à la manière d’un pastiche onirique.
Les collections s’amusent des mélanges d’époques et de cultures. Les motifs célèbrent l’architecture classique ou brutaliste, les jardins et paysages, les portraits canins et font référence à des oeuvres illusionnistes ou aux fêtes surréalistes. Conçues comme un collage de couleurs, textures et fantaisies, les collections The Cult of Beauty et The Surreal World, présentent une insolente sophistication, comme un nouvel âge d’or de la décoration.
En septembre, Triode fête l’ouverture de son nouveau showroom. A cette occasion, Jacques Barret invite les designers américains qu’il promeut depuis maintenant plus de dix ans à imaginer, dans l’espace de Saint-Germain-des-Prés, une installation virtuelle mettant en valeur leurs produits, leurs nouveautés et reflétant l’univers de chaque studio.
Pour cette nouvelle édition de la Paris Design Week, Triode accueille les projets de Bower et John Pomp, présentés lors d’une exposition associant images photoréalistes de l’artiste 3D Victor Roussel, échantillons de matériaux et projection de vidéos montrant les processus de création. Cet événement met à l’honneur un mode de travail et un savoir-faire inégalé que l’on retrouve dans le souci du détail, la qualité de fabrication ou le design spécifique.
Pensée comme une villa Médicis moderne pour mieux connecter les marques aux artistes et à la culture, la Rupture House est un appartement de collectionneur, une galerie privée, un lieu de rencontre et d’influence.
A l’invitation de Thomas Erber, Matthieu Salvaing investit la Rupture House et présente pour la première fois un travail plus personnel entamé il y a maintenant deux ans autour de l’architecture vernaculaire africaine, source inépuisable d’art et d’histoire, sublimant la matière comme le geste ancestral de l’artisan. Exposition imaginée comme un dialogue, c’est tout naturellement que Matthieu invitera le jeune designer Frédéric Imbert à mettre en résonance ses dernières créations avec les photographies du Ghana et de l’Ethiopie.
Deux univers et deux visions du monde qui se rejoignent pour partager cette même volonté de placer l’humain au cœur de la création, loin des esthétiques lisses et standardisées de nos sociétés contemporaines, laissant libre court à l’émotion. Rappelant l’importance d’un environnement local sensible et humain, le geste du designer comme le regard du photographe invitent à questionner ce besoin de faire sens, à mettre en valeur la différence riche de partage.
Cette exposition propose au spectateur de prendre part à cette conversation entre deux continents, entre passé et présent, entre art et savoirs faire ancestraux. Véritable ode aux couleurs, aux matières, c’est aussi toute la sensualité du geste ou de la courbe naturelle des éléments qui est mise en lumière dans ce dialogue d’artistes.
RUPTURE HOUSE
1 place André Malraux 75001 Paris
(entrée gratuite sur inscription par mail : house@rupture.tv)
La Galerie Chevalier installée aujourd’hui au 25, rue de Bourgogne dans le 7eme, après presque 40 ans quai Voltaire, est spécialisée en tapisseries anciennes (du XVIe au XVIIIe siècles), modernes (1920 à 1960), contemporaines (de 1970 à nos jours) et en art textile actuel.
Passage obligé des amateurs de textiles, la Galerie Chevalier reçoit une clientèle internationale composée de particuliers, de conservateurs de musées, d’architectes d’intérieur. Depuis 20 ans, les tapis Parsua, édités par la Galerie, allient luxe et développement durable. Pour fêter cet anniversaire Amélie Margot Chevalier et Céline Letessier ont demandé à 20 designers qui n’avaient encore jamais travaillé le tapis d’en créer un : Azel Ait-Mokhtar, Marie Berthouloux, Augustina Bottoni, Clément Brazille, Fabien Cappello, Hors Studio, Garnier et Linker, Arthur Hoffner, Charlotte Jullliard Alexandre et Logé ont ainsi créé une collection époustouflante ! .
Tout au long d’un parcours riche de 140 œuvres, cette exposition, co-organisée avec le musée du Castello Sforzesco de Milan, présente dans son contexte artistique la sculpture de la seconde moitié du 15e siècle et du début du 16e siècle, période considérée comme l’apogée de la Renaissance. À partir de Florence, une variété de styles s’épanouit alors de Venise jusqu’à Rome. La représentation de la figure humaine dans la diversité de ses mouvements prend alors des formes extrêmement novatrices. Ces recherches sur l’expression et les sentiments sont au cœur des démarches des plus grands sculpteurs de la période, depuis Donatello jusqu’à l’un des créateurs les plus célèbres de l’histoire, Michel-Ange. L’exposition propose également d’aller à la découverte d’artistes moins réputés, d’admirer des œuvres difficilement accessibles de par leur lieu de conservation (églises, petites communes, situation d’exposition dans les musées), afin de les remettre en lumière.
« Le Corps et l’Âme » fait suite à l’exposition « Le Printemps de la Renaissance » présentée en 2013 au Louvre et au Palazzo Strozzi et consacrée aux prémices de l’art de la Renaissance à Florence dans la première moitié du Quattrocento.
Trois parties majeures structurent l’exposition : Dans La fureur et la grâce,les compositions complexes s’attachent à traduire la force et l’exaspération des mouvements du corps, inspirées des modèles antiques, qu’on reconnait dans les œuvres d’Antonio del Pollaiolo, Francesco di Giorgio Martini ou Bertoldo, mettant en jeu autant la force et les torsions du corps masculin que l’effet expressif des plus intenses passions de l’âme. A contrario, des drapés élégants, entourant des corps majoritairement féminins, permettent aux artistes de révéler le charme de la figure humaine, qui débouche sur la représentation ultime de la grâce à travers le nu.
Emouvoir et convaincre souligne une volonté affirmée de toucher violemment, dans les représentations sacrées, l’âme du spectateur. À la suite du travail de Donatello autour de 1450, l’émotion et les mouvements de l’âme prennent une place déterminante au cœur des pratiques artistiques. Un véritable théâtre des sentiments se déploie en Italie du nord entre 1450 et 1520, en particulier dans les groupes de Déposition du Christ, tels ceux de Guido Mazzoni ou de Giovanni Angelo del Maino. Cette recherche du pathos religieux s’incarne également dans les émouvantes figures de Marie-Madeleine ou de Saint Jérôme qui fleurissent en Italie à cette période.
Enfin, avec De Dionysos à Apollon, la réflexion inépuisable sur l’Antiquité classique s’exprime dans les œuvres élaborées à partir des modèles classiques comme le Tireur d’épine ou le Laocoon. Parallèlement au domaine de la peinture (avec le « style doux » du Pérugin ou du jeune Raphaël), la sculpture développe la recherche d’une nouvelle harmonie qui transcende le naturalisme des gestes et des sentiments extrêmes. Particulièrement vivante dans un classicisme affirmé en Vénétie et en Lombardie, cette quête d’une beauté expressive qui aspire à l’universel s’incarne également fortement en Toscane et à Rome où la Papauté de Jules II et de Léon X joue un rôle d’irrigation et d’unification stylistique.
Le stile dolce aboutira au commencement du XVIe siècle avec l’apparition du « sublime », mettant en place un nouveau classicisme sous l’impulsion de Raphaël et Michel-Ange. Dès la fin du Quattrocento, Michel-Ange opère cette synthèse formelle qui intègre à la fois la connaissance scientifique des corps, un idéal absolu de beauté et la volonté de dépasser la nature par l’art. Cette recherche l’emmène à créer Les Esclaves du Louvre pour parvenir jusqu’à l’expression de l’ineffable dans ses dernières œuvres.
https://germanopratines-staging.ovh/wp-content/uploads/2020/09/ob_b64105_img-8555-olympie-hermes-portant-dionysos-enfant.jpg10591600Hélènehttps://germanopratines-staging.ovh/wp-content/uploads/2019/12/logo-germanopratines-3-1030x221.pngHélène2021-09-04 14:05:002021-09-20 12:52:39Le Corps et l’Âme
A l’occasion de l’exposition « Moriyama+Tomatsu : Tokyo » à la Maison Européenne de la Photographie, la Galerie Da-End vous propose de redécouvrir sa série Erotica du japonais Daïdo Moriyama. L’exposition « Onna (Femmes) » présente une vingtaine de clichés sulfureux, donnant à voir un pan plus intime et sensuel du photographe.
Figure majeure de la photographie japonaise du début des années soixante-dix, Daido Moriyama appartient à un mouvement de photographes (dont Tomatsu et Araki) rejetant l’image préconçue et porteuse d’un message, au profit de celle anti-conformiste, sauvage et brute. Témoin de l’oscillation du Japon entre tradition et modernité, cette génération a largement contribué à renouveler le langage photographique de l’époque. Moriyama tout particulièrement mitraille la ville et tout ce(ux) qu’il croise(nt) de façon obsessionnelle et subreptice, comme pour compiler les souvenirs d’un monde éphémère et flottant. « Les photographies sont les empreintes de la lumière et la mémoire, les photographies constituent l’histoire de la mémoire. C’est le mythe de la lumière.1 » Il entraîne notre regard à l’esthétique de l’instantané – résultat d’une photographie prolifique dans un monde indompté.
Le photographe est irrévocablement attiré par les endroits les plus à la marge, par le tout venant, les non lieux, les invisibles, par les quartiers crades et poisseux de la ville : prostituées, mafieux, marmailles, passages piéton bondés ou bains publics.
« Je bats le bitume comme un chien errant. » Il se laisse aller à l’errance et au voyage urbain dans les recoins les plus sombres, comme ces chambres miteuses ou ces bars tapissés de bouches pulpeuses. Fragments de corps, femmes aux cigarettes, culs dénudés… Chez Moriyama, le lugubre côtoie la volupté. Et la ville qu’il parcourt semble devenir corps, construisant un rapport charnel aux ruines d’un Japon en reconstruction. Une mise en parallèle des corps humains et urbains. Ainsi immortalise-t-il des femmes nues, lascives ou ligotées, accroupies ou allongées, parfois même les aguicheuses des affiches publicitaires. Sa photographie appelle au corps à corps. Car le désir surgit de toute part lorsque le monde de Daido Moriyama prend forme et éclabousse sa photographie. Un noir et blanc tantôt onirique ou sensuel, un corps flouté dans un cadrage chahuté. Une couleur saturée voire érotique de la ville en mouvement, incessamment, de la ville et sa trivialité. Une ville friponne, nippone, mais pas que. « Le noir et blanc exprime mon monde intérieur, les émotions et les sensations que j’ai quotidiennement quand je marche sans but dans les rues de Tokyo ou d’autres villes. La couleur exprime ce que je rencontre, sans aucun filtre, et j’aime saisir cet instant pour ce qu’il représente pour moi. Les premières sont riches en contraste, dures, et reflètent pleinement ma nature solitaire. Les secondes sont polies, sages, comme je me présente au monde.»
« Il se réduit parfois à quelques traits de crayon jetés sur une feuille de papier mais souvent, il prend l’allure d’une véritable œuvre d’art tout en couleurs et en nuances : le dessin joaillier a ceci de particulier qu’il nous touche par sa beauté autant qu’il nous instruit sur le processus de création d’une pièce joaillière. Peu étudié, peu publié, encore plus rarement exposé, le dessin joaillier reste méconnu du grand public. Il joue pourtant un rôle essentiel, servant de référence à l’ensemble des mains qui interviennent dans la création du bijou. Depuis la Renaissance, dessiner le bijou constitue l’étape première – primordiale pourrait-on dire –, celle qui donne vie à l’idée, celle qui permet à l’idée de devenir projet. C’est à cet objet longtemps délaissé – outil technique au service des métiers mais aussi œuvre sensible – que L’École des Arts Joailliers souhaite rendre hommage, en s’intéressant à son histoire, sa technique, ses auteurs et son statut. Après avoir ouvert un chantier de recherche en 2018 sur le dessin joaillier, créé un cours sur ce sujet inédit, L’École est fière d’organiser la première exposition consacrée à ce thème abordé avec une approche aussi large.
Les œuvres sélectionnées couvrent un long XIXe siècle, qui débute dans les années 1760 et s’achève avec la Première Guerre mondiale ; elles ont été exécutées par de nombreux artistes ou dessinateurs, célèbres ou anonymes ; elles illustrent enfin une grande diversité de techniques et d’usages, qui disent l’intérêt et la richesse du sujet. Toutes proviennent du Fonds Van Cleef & Arpels sur la Culture Joaillière, fonds constitué à des fins de recherche, de présentation et d’utilisation pédagogique. En sortant de l’ombre le dessin joaillier à l’occasion de cette exposition, L’École des Arts Joailliers accomplit sa mission de partage de la culture joaillière. »
L’exposition présentera une soixantaine de dessins et plusieurs carnets, tous issus du Fonds Van Cleef & Arpels sur la Culture Joaillière, qui comprend une collection d’art graphique exceptionnelle présentée pour la première fois au grand public.
Un premier examen attentif de cette collection permet de rassembler un corpus d’une centaine d’œuvres qui couvrent un long XIXe siècle commençant dans les années 1770 et s’achevant avec la Première Guerre mondiale. Cette période reflète l’éclectisme d’un siècle qui juxtapose des modèles anciens et des artistes d’avant-garde. L’originalité de l’exposition réside dans l’association de grands ateliers tels Lalique ou Vever à des noms moins connus comme Paillet, Brédillard, Hatot, Mellerio Borgnis. À travers les différents dessins du corpus, l’exposition permettra de s’interroger sur ce qu’on dénomme « dessin joaillier ».
Plusieurs axes émergent. Le premier étant celui de sa mise en œuvre : techniques, supports utilisés, matériaux, normes de ce type de dessin… Ce qui mène à savoir qui en est l’auteur : un dessinateur joaillier, un dessinateur spécialisé, un artiste ? Combien de mains peuvent intervenir pour sa réalisation ? Enfin, reste la question de l’usage de ce dessin : à l’origine c’est avant tout un « outil technique » qui doit guider les différents corps de métiers dans la réalisation de la pièce, mais il est susceptible de devenir, avec le temps, une oeuvre d’art à part entière, admirée et recherchée pour ses qualités propres.
Accompagnée d’un livre coédité par Norma et L’École des Arts Joailliers, l’exposition ouvre un nouveau champ d’étude d’un art aux multiples fonctions. La scénographie propose une expérience immersive à l’intérieur d’un espace entièrement dessiné, plongeant ainsi le visiteur dans un dessin grandeur nature.
Depuis quinze ans, Pascal Cuisinier collectionne patiemment le travail du designer Robert Mathieu, et pour fêter le centenaire de la naissance de ce créateur de luminaires majeur de la scène française des années 1950, il a décidé de présenter au cours de l’année les cent plus beaux luminaires de ce créateur, encore peu connu du grand public, mais affectionné par les afficionados des luminaires de cette période.
Contrairement à de nombreux designers, Robert Mathieu ne concevait pas seulement ses luminaires mais il les réalisait, à l’instar d’un artiste, dans son atelier de la rue de Charenton, à Paris. Ici pas d’éditeur, ni de distributeur, mais une production au compte-goutte proche de celle d’une oeuvre d’art, à parfois moins de 8 exemplaires.
Sa créativité était incroyable puisqu’il a probablement inventé plus de cent cinquante modèles de luminaires, mais la très grande qualité d’exécution de ses pièces, qui sont encore aujourd’hui en parfait état de fonctionnement, est aussi un fait rare. Il est aussi le seul créateur connu à avoir conçu une applique et un plafonnier à double balancier qui fonctionnent comme un mobile de Calder et sont présentés dans cette exposition. Cependant, la toute petite production de ces pièces les ont bien sûr rendues rarissimes.
Il aura donc fallu quinze ans à Pascal Cuisinier pour voir sortir sur le marché les plus rares et les plus exceptionnelles et en collectionner plus d’une centaine dont environ 80 modèles différents. Au printemps dernier, la galerie a présenté la première partie du travail de ce créateur, entre 1950 et 1955. Cette fois ce sont ses luminaires créés entre 1955 et 1975 qui sont présentés, assortis d’un catalogue raisonné des luminaires répertoriant l’intégralité de ses modèles connus.