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Kim KototamaLune

Le Prologue de la Matière

Les nouvelles sculptures aux formes organiques de Kim KototamaLune (née en 1976 à Ho-ChiMinh-Ville,Vietnam) témoignent de ses multiples intérêts pour les neurosciences, la physique quantique ou la philosophie orientale, lesquels constituent, entre autres choses, les éléments moteurs de sa pratique des arts plastiques. Car au-delà des performances techniques que requière précisément sa discipline, le maniement du verre, l’artiste est avant tout animée par une question : « Comment incarner cette sensation impossible à nommer ? », celle que certains appellent le vide et que d’autres, les scientifiques, qualifient de « prologue de la matière.* »

Hantée par cette problématique, la plasticienne conçoit installations et sculptures de verre qu’elle soude ou file consciencieusement, sans moule ni matrice, pour mieux se confronter à ce vide. Le geste est à la fois obsessionnel et thérapeutique lorsqu’elle tisse la dentelle de verre fragile et aérienne. Comme une ode au dialogue entre Science et Art, trois installations majeures rythment l’exposition et témoignent de la volonté de Kim KototamaLune d’établir le lien entre microcosme et macrocosme. D’abord, Le Crépuscule des Âmes, un arbre mutilé qui semble se revitaliser grâce à une multitude de pousses de fœtus, permet à l’artiste de traiter du thème de la métamorphose des corps et de leur régénération. Ensuite, Le Silence du Nom, sous la forme d’un œuf réceptacle, fait référence à ce qui pré-existe à la matière, à cette quête des origines et de la mémoire cellulaire. Enfin, Une Espèce d’Eternité, un cœur d’embryon démesurément grand – né du programme Organoïde mis en place par l’Institut Pasteur – évoque aussi bien les richesses symboliques du cœur que les avancées scientifiques sur cet organe.

Telle une nécessité de trouver une issue à son histoire personnelle, Kim KototamaLune crée à travers ses œuvres la possibilité d’un espace d’entre-deux, avec ces interstices « qui permettent le mouvement intérieur, passant du néant destructeur au vide fécond, un vide qui accueille et dont la spatialité s’étend à l’infini ». L’artiste, davantage guidée par une recherche de sens que par une esthétique formaliste, cherche constamment le lien entre rythme intérieur et mouvements extérieurs, chair et matière, entre vide quantique et vide des origines (taoïste), nous révélant l’invisible dans un visible fait de transparence et de lumière.

* Etienne Klein, Ce qui est sans être tout à fait : Essai sur le vide, Acte Sud, 2019

du 23 janvier au 7 mars 2020

GALERIE DA END

17 rue Guénégaud 75006 Paris