Esther de Beaucé
Depuis la création de sa galerie, elle est la seule, à Paris, à éditer des bijoux d’artistes. D’autres bien sûr lui ont ouvert la voie, mais aucun, aujourd’hui, n’a ce travail à la fois aussi large et pointu d’édition, de production et de diffusion.
Avant de se lancer dans cette aventure, Esther de Beaucé a toujours vécu et évolué parmi les artistes et les collectionneurs et c’est donc vers l’art contemporain, sa passion, qu’elle s’est d’abord tournée, en créant une première galerie qui défendait le travail de jeunes artistes. Cette expérience lui a très vite donné envie de continuer à travailler avec eux, mais d’une manière différente.
Elle constate alors qu’à Paris il n’y a plus d’éditeurs de bijoux d’artistes et c’est un domaine qu’elle connait bien puisqu’elle est la fille de Diane Venet, qui en possède l’une des plus jolies collections
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Esther n’a pas alors vraiment de culture du bijou proprement dit, elle n’a jamais travaillé avec des orfèvres, mais elle a un lien ténu avec ces sculptures miniatures et se lance en choisissant Saint-Germain des prés et le Carré Rive Gauche pour cette deuxième galerie. Elle y trouve un univers foisonnant qui mélange arts décos et art contemporain, où le bijou d’artiste trouve naturellement sa place.
Passer de l’échelle Un, celle d’une œuvre, à l’échelle Deux, celle du corps lui permet tout de suite de travailler avec des artistes très connus qui trouvent là une autre manière de s’exprimer, un nouveau champ de création : François Morellet, qui est le premier à lui dessiner un projet, Bernar Venet, Claude Lévêque, Andres Serrano, Barthélémy Toguo, Pablo Reinoso, Sophia Vari, Phillip King, Françoise Petrovitch, Miguel Chevalier, Vera Molnar … mais aussi de plus jeunes artistes comme Nicolas Buffe.
Elle fait d’abord appel à des artistes dont elle aime le travail plastique. Ce sont plus souvent des sculpteurs que des peintres car l’appréhension du volume leur est familière, mais Esther travaille aussi avec des designers comme Constance Guisset, Christian Ghion, François Azambourg, David Dubois, Nestor Perkal, Cedric Ragot, Pierre Gonalons et Frédéric Ruyant.
Chez MiniMasterpiece, la visite se fait autour d’un meuble à mille facettes où l’artiste et scénographe Yann Delacour crée de nouvelles scénographies à chaque exposition. Comme un panorama miniature de l’art contemporain, on passe sur quelques mètres d’un artiste à un autre, du cinétique au baroque, découvrant les formes, les matières et même les couleurs, identifiant parfois l’artiste ou laissant Esther nous glisser son nom. Mais dans chaque pièce on peut reconnaître l’ADN du travail de chacun. Ce sont des bijoux parce qu’ils peuvent être portés, mais ils restent avant tout des œuvres d’art.
Aux artistes, Esther laisse une liberté totale dans la création. La seule contrainte pour eux est que leur œuvre puisse être portée. Ils peuvent donc utiliser tous les matériaux, des métaux précieux, l’or, le vermeil l’argent, aux matières brutes comme le ciment, mais aussi le bois, l’ambre, la résine, les émaux, les possibilités sont presque infinies.
Quand leur projet est terminé, ils lui donnent un dessin, une maquette ou une cire, qu’elle confie à son tour à des orfèvres, auprès desquels elle suit toutes les étapes de fabrication du bijou. Cette année pour la première fois, elle collabore avec la Manufacture de Sèvres qui interviendra pour les pièces en porcelaine d’un bijou de Nicolas Buffe.
Porter un bijou d’artiste est un vrai parti pris, ce sont des pièces fortes, que l’on porte différemment, mais s’en offrir un est-il si facile ? Plutôt oui. La galerie offre un spectre très large de prix, souvent très raisonnables au regard du bijou traditionnel, pour des pièces qui sont uniques ou à éditions très limitées.
Et la galerie collabore aussi régulièrement pour des éditions plus larges avec les librairies des Musées pour leurs grandes expositions : le Centre Georges Pompidou, la Fondation Vuitton ou le Musée des Arts Décoratifs, comme aujourd’hui pour « Bijoux d’artistes », avec une paire de boucles d’oreilles de Carlos Cruz-Diez, artiste cinétique, que l’on va s’empresser de porter au printemps. Esther sera elle à New York, pour Collective Design où elle présentera ses bijoux à un public américain qui en est si friand.
Photos © Yann Delacour